L E P O L A R O I D
C R É A T I F
« Rater, rater encore, rater mieux !
(Samuel Beckett)
Les photos qui suivent ont été faites avec un Polaroid Now, un appareil photo instantané aux réglages pour le moins rudimentaires : une mise au point calée à 2 mètres, trois niveaux d'exposition, avec ou sans flash, et de la pellicule noir et blanc ou couleur. Le résultat dépend comme pour tout appareil photo de la luminosité ambiante, mais aussi de la température ; la pellicule du Polaroid Now déteste le froid.
À notre époque où rater techniquement une prise de vue est difficile en raison de la sophistication des appareils photo numériques, travailler avec un matériel dont le résultat est à tel point aléatoire que l’on serait tenté de le renvoyer en usine au vu des piètres résultats, réserve cependant des plaisirs d’un autre temps, celui où après avoir appuyé sur le bouton, on s’interroge légitimement sur ce qui sortira de l’appareil, sur ce que rendra la pellicule après les quelques minutes de développement dans une relative obscurité.
À l’heure où appuyer sur le bouton d’un appareil photo numérique ne coûte plus rien, le coût prohibitif de la pellicule Polaroid ajoute à la poussée d’adrénaline que provoque l’incertitude du résultat. Avec le Polaroid Now qui est le mien - car d'autres ont un rendu sans doute très différent -, la photo techniquement parfaite est illusoire, la photo "ratée" est la règle.
Les Polaroid originaux sont conservés dans un bel album dont la présentation est à la hauteur de l’investissement financier qu’ils représentent. Ils ont tous été traités avec Photoshop. Les intrusions inattendues de lumière, les phénomènes électriques se traduisant par de blanches efflorescences ont cependant été conservés car ils participent au charme beckettien. Photoshop ne sert qu’à améliorer considérablement la gamme tonale, donner de la densité là où il en manque, révéler de la matière dans les trop hautes lumières. Le numérique vient ainsi au secours du chimique.
|
